Langue populaire et argotique : De beaux restes

Lorsque l’on veut qualifier, le plus souvent de façon péjorative, une femme d’âge mûr qui a conservé intacte une bonne part de ses charmes d’antan, il arrive que les Chinois aient recours à l’histoire, et notamment à celle de l’époque dite des dynasties du Sud (南朝 [náncháo], 420-589), plus précisément à celle du règne de l’empereur Xiao Yì (萧绎 [xiāo yì]), plus connu sous le nom de Yuandi des Liang (梁元帝 [liáng yuándì], qui vécut de 508 à 555, et régna de 552 à 554).
Dans le gynécée de l’empereur Yuandi se trouvait une concubine (妃子 [fēizi]) qui dans sa jeunesse avait été d’une beauté exceptionnelle, connue sous le nom de Xu Zhaopei (徐昭佩 [xú zhāopèi]), dont on ignore la date de naissance, mais dont on sait qu’elle décéda en 549.
Fille d’un haut dignitaire, elle était passablement orgueilleuse, et n’hésitait pas à se moquer de l’empereur. Elle aimait en outre immodérément l’alcool, et fit tant et si bien qu’un jour, elle vomit sur la robe impériale. Elle fut dès lors délaissée, et n’eut plus l’honneur de se voir honorée des bontés du souverain.
S’ennuyant passablement, et peu enclinte à la solitude, elle fricota d’abord avec un taoïste peu respectueux de la règle de chasteté de son culte, avant de réserver la douceur de sa couche à un jeune homme bien fait de la cour. Elle n’était alors plus dans sa prime jeunesse, mais ses amants disaient d’elle que, malgré son âge, elle n’était pas sans charmes.
Aujourd’hui, on utilise la métaphore de la « dame Xu à moitié vieille » (半老徐娘 [bànlǎo xú niáng]) pour qualifier une femme d’âge mûr dont les charmes ne laissent pas indifférent tout homme normalement constitué. L’expression a le plus souvent une connotation péjorative.
Baidu consacre ici un billet à cette expression.

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2 commentaires pour Langue populaire et argotique : De beaux restes

  1. Gaoruyu dit :

    En Chine, il existe malheureusement un langage très sexiste et votre expression « de beaux restes » me fait penser à celle extrêmement déplorable de la chine moderne 剩女 « shengnü » qui désigne les femmes qui restent, une formule péjorative lancée par le gouvernement chinois pour qualifier les femmes éduquées dans la vingtaine qui choisissent de ne pas se marier….. Dans toutes les langues, les hommes ont toujours trouvé maintes paroles pour décrire les femmes qui menacent leur fragile virilité.

    • pascalzh dit :

      Vous avez raison, les expressions sexistes sont très nombreuses en Chine.
      Et l’expression 剩女 n’est absolument pas tombée en désuétude, je l’ai entendue utilisée plusieurs fois.
      Maintenant, à Taiwan notamment, on parle de 单身贵族 (noblesse célibataire) pour qualifier les jeunes gens et jeunes femmes (il s’agit le plus souvent de jeunes femmes, d’ailleurs) qui ne se marient pas.

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